La location des applications, par opposition à l’achat de licences, ne cesse de gagner du terrain. Si elle présente de nombreux avantages, il est important toutefois de bien anticiper les risques inhérents à ce mode de consommation de l’IT. Pour bien choisir, il faut partir du contexte et des contraintes de l’entreprise.
Avec une croissance annuelle moyenne estimée à 16% sur les trois prochaines années par IDC, le marché du SaaS se porte bien en France. Il représentait 15% du marché des logiciels en 2017 et devrait atteindre les 24% en 2021. En volume, il devrait passer de 1 937 millions d’euros en 2017 à 3 528 en 2021. Pourquoi cet étalage de chiffres ? Il est avant tout là pour démontrer que si les entreprises françaises se sont montrées quelque peu frileuses au départ, aujourd’hui elles doutent de moins en moins et optent de plus en plus pour ce modèle de consommation du logiciel.
Louer plutôt que d’investir
Le concept de SaaS ou “Software as a Service” est apparu pour la première fois dans une revue américaine en 2001. En France, on lui a préféré dans un premier temps un autre anglicisme, l’ASP pour “Application Service Provider”. Si dans les détails, ces deux modèles diffèrent quelque peu, leur principe reste toutefois similaire, le SaaS étant dans une certaine mesure l’aboutissement de la logique défendue par le mode ASP.
L’idée est relativement simple : plutôt que d’investir dans des licences et des infrastructures matérielles et logicielles, l’entreprise loue l’utilisation d’applications hébergées et maintenues par un prestataire, moyennant un abonnement au mois et/ou à l’usage. C’est pourquoi d’ailleurs le SaaS est assimilé à une dépense de type Opex (Operational Expenditure), ce qui en soi constitue déjà un des avantages de ce modèle.
Le mode SaaS est en effet un service, dont le coût constitue une charge immédiatement déductible du résultat de l’entreprise, alors qu’un investissement (ou Capex pour Capital Expenditure / dépenses d’investissement de capital) est déduit du résultat par le biais d’amortissements étalés sur plusieurs années. De plus, les Opex favorisent davantage de transparence : là où l’entreprise aurait dû investir lourdement en infrastructure pour déployer une application sans forcément avoir de visibilité précise sur le ROI, l’approche Service permet de ne payer que ce qui est consommé et d’ajuster ses abonnements aux besoins réels mois après mois.
Se focaliser sur la valeur ajoutée métier
SaaS et cloud sont souvent assimilés. Et pour cause ! Les logiciels proposés en SaaS sont typiquement hébergés dans un cloud, administré par l’éditeur. Pour autant SaaS et cloud ne signifient pas la même chose : tandis que le SaaS met à disposition une application, le cloud est une notion beaucoup plus large qui permet à l’entreprise de bénéficier d’une infrastructure complète (IaaS ou Infrastructure as a Service) et de services prêts à l’emploi ou à intégrer dans le développement d’applications (PaaS ou Plateform as a Service).
De manière générale, tous ces concepts ont un point commun : l’entreprise n’a plus besoin d’investir dans ses propres infrastructures. Au-delà des aspects financiers, cette démarche permet de confier la « tuyauterie » informatique au prestataire et de se focaliser sur la réelle valeur ajoutée métier de l’IT. Typiquement, plutôt que de consacrer des ressources à l’administration de serveurs ou à la mise à jour des applications sur les postes de travail, l’entreprise peut utiliser ses ressources IT pour imaginer et développer les services qui la distingueront de la concurrence.
Gagner en réactivité
De la même façon, l’entreprise ne perd plus de temps à déployer ses propres infrastructures avant de pouvoir exploiter une application. Une fois l’abonnement pris, le logiciel peut être aussitôt exploitable par les utilisateurs. En pratique, le SaaS demande souvent des paramétrages, ne serait-ce que pour intégrer les profils des utilisateurs autorisés à accéder au logiciel, mais globalement sa mise en œuvre reste beaucoup plus rapide qu’un déploiement interne. L’ajout d’un nouvel utilisateur se fait aussi plus vite : il suffit de prendre un abonnement supplémentaire.
En d’autres termes, l’entreprise est beaucoup plus agile, elle peut plus facilement faire face à des pics de charge en changeant d’abonnement. Et toujours selon le même principe qui est de ne payer que ce qui est consommé, elle peut aussi revoir son abonnement à la baisse après un pic de charge de travail pendant lequel, par exemple, elle aura souscrit des abonnements supplémentaires pour des prestataires ou des intérimaires.
Mobilité et accessibilité
Autre avantage et non des moindres à l’ère de la mondialisation et de la mobilité, les applications SaaS sont en théorie accessibles de n’importe où. Une filiale en Chine ? Il suffit de disposer d’une connexion Internet, d’un périphérique connecté et généralement d’un client Web pour accéder à l’application. Du coup, quelle que soit la situation de mobilité – commerciaux sur le terrain, agents de logistique en entrepôt ou simplement voyageurs dans un train -, l’utilisateur a toujours accès à ses outils de travail, depuis partout et n’importe quand, pour peu qu’il ait un périphérique connecté, douchette, ordinateur portable, tablette ou smartphone.
Sécurité renforcée
Enfin, la sécurité d’une infrastructure SaaS est généralement bien supérieure à celle qu’une entreprise déploie en interne. À moins d’être prêt à dépenser des fortunes en matériel, logiciel et ressources humaines pour un risque qui n’est que potentiel, donc avec un ROI très incertain, l’entreprise peut difficilement rivaliser avec les mesures mises en place par les fournisseurs de SaaS qui eux, par opposition, bénéficient des avantages de la mutualisation pour déployer des solutions certes très onéreuses, mais dont les coûts sont amortis par le nombre d’utilisateurs.
De plus, là où nombre d’applications internes sont en retard sur les mises à jour et autres patchs faute de temps et de personnel pour les appliquer, les applications SaaS sont automatiquement actualisées par leur fournisseur, ce qui permet d’éviter les brèches de sécurité et, au passage, de profiter des dernières innovations et ajouts de fonctionnalités.
Bien choisir son prestataire et ses services
Aujourd’hui, rares sont les éditeurs à ne pas proposer leurs solutions en mode SaaS. Certains, comme Adobe, par exemple, ont même complètement basculé, en abandonnant la vente de licences au profit d’une approche locative.
Si les avantages du SaaS sont indéniables, il convient toutefois de souligner ses risques inhérents, notamment en termes de choix de prestataires. De fait, une application fonctionne rarement seule et nécessite souvent des intégrations avec l’existant : il est essentiel que cette intégration soit facilitée par la présence d’API notamment.
Dans le même ordre d’idée, l’entreprise a le droit de changer d’avis : avant de s’engager, elle doit impérativement s’assurer que le contrat d’abonnement prévoit des modalités pour récupérer ses données facilement, voire dans certains cas les transférer directement au nouveau prestataire. Au passage, l’entreprise doit aussi anticiper tous les problèmes potentiels par des clauses contractuelles, qu’il s’agisse d’un défaut de service de la part du prestataire, d’une baisse de qualité ou même d’un arrêt complet suite à un dépôt de bilan.
Dans une logique d’agilisation des organisations, la facilité d’accès aux applications SaaS induit parallèlement la possibilité pour les métiers d’accéder aux applications qui leur sont utiles à l’insu de la DSI. C’est le phénomène du Shadow IT né de la frustration des métiers à s’entendre trop souvent répondre « Non » à leurs demandes par la DSI. Ce Shadow IT n’est cependant pas inévitable. A la DSI de savoir être force de proposition et mettre en place les solutions de « Single Sign On » et d’intégration qui lui permettront de garder le contrôle sur ces applications et ces nouveaux usages.
Il faut également savoir que le stockage dans le cloud des données utilisées par l’application n’est pas toujours une obligation. De plus en plus d’applications en mode SaaS proposent aux entreprises de conserver leurs données en interne, ne serait-ce que pour des raisons de conformité réglementaire.
Enfin, le SaaS, et plus généralement le cloud, sont considérés comme des modèles plus économiques : ce n’est en aucun cas une vérité absolue ! Une application utilisée par de nombreux utilisateurs 24h sur 24, 7h jours sur 7, peut s’avérer très chère en SaaS puisque le modèle de facturation repose sur l’usage.